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Apprendre à s’aimer avec Ahimsa



Lors de ma formation de professeure de yoga l’un des plus beaux principes philosophiques du yoga que j’ai appris et que j’essaye depuis d’appliquer sur le tapis et dans ma vie est AHIMSA.

Selon la philosophie du yoga, Ahimsa est un Yama c’est-à-dire un principe de comportement, de code de conduite à avoir en société. Littéralement, sa signification est “ne pas blesser, ne pas nuire” qu’on interprète généralement en “non-violence”.

Un principe aux mille facettes

Ahimsa, c’est ce principe auquel se réfère Gandhi pour mener son combat pacifiste.

C’est aussi ce même principe auquel on se réfère pour respecter tous les êtres vivants, animaux et végétaux. L’écologie et le végétarisme prônent Ahimsa à leur manière.

En tant que professeur de yoga, c’est également ce principe auquel je me réfère pour toujours formuler un enseignement juste, sain et respectueux de chaque élève.

Et c’est aussi, au quotidien, ce principe auquel je m’accroche dès que je ne me sens plus en phase avec moi-même, dès que je suis dans une période autodestructrice, dans un cercle vicieux, dans une autocritique constante ou encore dans une période de mélancolie profonde.

En découvrant ce principe, j’ai enfin mis un mot sur ce mécanisme d’auto-violence. J’ai compris que je pouvais être une personne violente, méchante, critique et destructrice envers une seule personne: moi-même. Pour être honnête, personne ne m’a fait et ne me fait autant de mal que moi-même. Je tiens à préciser que nous avons chacun notre propre seuil d'auto-violence, selon notre histoire, notre vécu. Alors bien sur, ça varie d’intensité selon les périodes, les saisons. Par exemple, l'hiver est pour moi une période d'introspection assez critique.

Cette violence, elle s’exprime en moi par le biais du corps et du mental.


Ahimsa envers son corps

Notre corps étant notre temple, l’enveloppe qui transporte notre âme, il faut apprendre à en prendre le plus grand soin.

Or j’ai toujours eu une relation très conflictuelle avec ce corps, en raison de la société publicitaire dans laquelle j’ai grandi et en raison de ma relation émotionnelle à la nourriture.

Sans être tombée dans une maladie chronique, toute baisse de moral m’entraînait toujours vers une consommation excessive de nourriture et vers un rapport très conflictuel à mon corps et donc à mon estime de soi. Et tout cela est bien sûr l’expression d’une certaine forme de violence. Une violence plus ou moins visible vis-à-vis de mon corps qui accumule alors cette nourriture mais qui accumule surtout des émotions négatives.

C’est en pratiquant le yoga que j’ai expérimenté Ahimsa envers mon corps.

En effet, sur le tapis, on apprend à être à l’écoute de son corps, à le respecter, à lui laisser le temps d’approfondir les postures, à accepter ses limites, ses faiblesses. Sans cela, nous risquerions de forcer, d’aller trop vite, de nous déséquilibrer, de tomber et surtout de nous blesser. Or souvent, cette attitude violente vis-à-vis de son corps sur le tapis vient du mental, de cet égo.


Ahimsa face au mental

N’étant pas en paix avec son corps, comment être en paix avec son mental et vice-versa ?

Ce mental, régit par l'égo, a la fâcheuse tendance d’être facilement négatif, blessé, vexé et égocentré. Au lieu de m’aider à développer d’autres genres de pensées, plus positives, il va se retourner contre moi. En effet, il me fait comprendre que si je suis aussi négative, triste, blessée, vexée ou autre, c’est à cause de moi, à cause de ce que j’ai fait, pensé, dit, vu et mangé. Il me fait alors retomber dans un nouveau cercle de violence. Cette violence n’est pas forcément visible, elle peut se rendre invisible aux yeux des autres et de soi-même, tout en étant pourtant bien présente. De l’extérieur, on peut paraître sain de corps et d’esprit, si on peut dire les choses ainsi ! Or à l’intérieur, cette violence bouillonne.

Cet égo, notre mental, c’est lui qui nous compare aux autres, qui nous rabaisse, nous critique, nous juge. En plus de fausser l’image qu’on a de nous-même et de notre corps, cet égo est en perpétuel bavardage, le plus souvent négatif et autocentré.

Pourquoi ? Car notre société est violente et est construite sur la compétitivité, sur des préjugés sociaux, sur la peur, sur la vitesse, sur les bruits. En effet, comment être en paix intérieure alors qu’autour de soi, ce n’est que klaxons, vrombissements, achats compulsifs etc etc

En tant que pratiquante mais surtout en tant qu’enseignante, je vois bien également à quel point l’égo de l’élève prend le dessus dans la posture au risque de le blesser et de passer à côté de l’intérêt de la posture.

Dans une posture telle que la Pince par exemple, l’égo de l’élève l’amène bien trop souvent à attraper ses pieds alors que son dos est tout voûté et contracté et que les bras sont tirés au max. Généralement aussi le regard circule à sa droite et à sa gauche pour comparer si l’élève voisin attrape lui aussi ses pieds ! Qui ne jette pas un oeil de côté de temps en temps ?! Et bien souvent, même mes instructions répétées et les variations physiques proposées n’arrivent à prendre le dessus sur cet égo.

Dans ces moments-là, je me retiens à trop réajuster l’élève car alors je sais que mon réajustement pourrait renforcer son égo qui risquerait de se vexer et se comparer encore plus aux autres et à créer alors un cercle d’auto-violence (“Pourquoi ai-je été ajusté? Pourquoi moi et pas mon voisin alors qu’il touche même pas ses pieds lui ? C’est parce que je suis nulle, c’est ça ? C’est parce je suis pas assez flexible ?”). En vrai, je ne sais pas du tout si mes élèves ont ce genre de pensées mais je sais que moi je les ai souvent eu en tant qu’élève !

Même en tant que professeur, j’ai toujours besoin de faire un travail sur Ahimsa afin de me rappeler que ce n’est pas grave et que ça ne remet pas en question la qualité de mon enseignement, si je ne sais pas, par exemple, maîtriser le grand écart ou si un élève est plus flexible que moi ou si ... (la liste peut être longue!)

Certes, sur le tapis et le coussin de méditation, ce n’est déjà pas facile de faire face à cet égo alors au quotidien....

Ayant récemment passé le cap des 30 ans, j’ai eu pas mal de mal à faire face à cet égo du fait de cette introspection liée au changement de dizaine assez violente ! Je me suis pas mal remise en question : qui je suis, ce que je fais, ce que je mange, où je vis, qui je fréquente, ce que je renvoie comme image etc etc ! Après, je vous rassure, il n’y a rien de très grave dans tout ça car il s’agit de mon seuil à moi de violence interne.

En tout cas, ça me fait prendre conscience que la violence que je crée, je la crée bien souvent en référence à la société, aux autres. Je me fais violence en pensant ainsi que je serai mieux accepter, valoriser et aimer. Oui, Aimer ! La réponse est là !


L’amour en réponse à la violence

Ahimsa ne peut se vivre et se réaliser sans Amour et notamment l’Amour de soi-même.

Si on s’aime tel que l’on est, notre amour développe en nous, dans notre corps et notre mental, une paix intérieure et une bienveillance. Bien sûr l’Amour des autres, de notre entourage est important mais il faut le voir comme un bonus. Il est important de s’aimer d’abord et avant tout pour ne pas tomber dans une recherche effrénée d’amour auprès des autres. On risque alors de se forcer à être ce qu’on n’est pas dans le but de plaire, de créer de la sympathie et de l’amour. On ne respecte pas alors la personne qu’on est vraiment et naturellement. Et on tombe dans le cercle de l’auto-violence. C’est bien sûr, plus facile à écrire qu’à faire !

Or plus on applique Ahimsa à sa vie, plus on se respecte, plus on s’aime et plus on est capable de vivre en bienveillance dans notre société.

BKS Iyengar donne à Ahimsa une signification positive de “Amour embrassant toute la création”


En pratique

“Ahimsa étant un attribut de l’âme, doit par conséquent être pratiqué par tout le monde, dans toutes les affaires de la vie. Si on ne peut le pratiquer en toutes circonstances, cela n’a pas de valeur pratique.” Mahatma Gandhi

Pour ma part, j’ai trouvé la réponse à cette violence grâce au yoga et à la méditation.

Ces pratiques nous apprennent que nous ne sommes pas cet égo et que nous pouvons faire la paix avec nous-même en appliquant Ahimsa, amour et bienveillance envers nous-même.

Et ça donne quoi en pratique ?

Conseils à appliquer Ahimsa sur le tapis :

* prendre conscience de sa respiration, accentuer le son de sa respiration, se concentrer sur ce son et sur le va-et-vient de l’air plutôt que de se laisser embarquer par ses pensées

* méditation sur le coeur, mains sur la poitrine, ressentir les battements du coeur, visualiser une énergie lumineuse et bienveillante

* utiliser son drishti, son regard conscient, en fixant un point fixe au sol, sur sa main, pied ou autre selon la posture et en dirigeant son regard intérieur vers une zone du corps pour être à l’écoute de ses ressentis et limites

* être patient dans chaque posture, celle-ci s’ouvrira un jour complètement à vous : practice and all is coming

* sortir d’une posture si inconfort, risque de blessure, muscles qui tremblent

Appliquer Ahimsa au quotidien :

* dessiner un sourire sur son visage

* écrire sur un papier qu’on placera à un endroit stratégique (bureau, porte d’entrée, fond d’écran smartphone, miroir) un mot, un mantra qui nous rappelle que nous sommes une personne aimée, aimante et bienveillante

* respirer calmement plusieurs fois, en étirant l’expiration, dès qu’on sent la violence envers les autres ou nous-même monter en nous

* se rappeler que nous ne sommes pas notre mental, notre égo

* observer si nos actions sont en accord avec notre vraie nature

* ne pas penser aux jugements des autres

* contrôler ses réactions face aux autres et développer une communication non violente

* en rentrant chez soi après le travail, allumer une bougie, un encens, s’asseoir 5 minutes et respirer calmement pour laisser à la porte la violence de la journée qui a pu s’accumuler en nous

* réduire sa consommation de viande

Et vous, comment gérez-vous cet égo ?


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